Photos et compte-rendu du forum sur la sobriété heureuse du 30 septembre 2023

A l’initiative du service paroissial " laudato si", le forum sur la sobriété joyeuse a réuni plus d’une trentaine de personnes à l’Abbaye de Bellefontaine, le samedi 30 septembre. Cadre de verdure exceptionnel, silencieux, habité par le chant des oiseaux, et ensoleillé cet après-midi-là.
Les participants ont d’abord écrit brièvement sur des post-It leur vision de la sobriété joyeuse. Au cours de l’après-midi, grâce à la richesse et la diversité des propos des intervenants, chacun a pu compléter et affiner son avis personnel.

Tous les post-it sur la sobriété écrits en début de rencontre

Voici les différents intervenants. (Cliquer sur chacun d’eux pour lire chaque témoignage)

Témoignage de Marie-Hélène à propos du pape François

Marie-Hélène qui a croisé François en Argentine, avant qu’il soit pape, a évoqué ce qu’elle a perçu de lui. Elle a pointé et développé son évolution et les traits de sa personnalité au travers de 4 axes importants dans son parcours :

  • Tout est donné
  • Tout est fragile
  • Tout est lié
  • Tout est communion
    A travers son parcours de vie François est devenu un pape prêchant la miséricorde de Dieu, la joie d’être chrétien. Il aime chaque personne et invite à une église en dialogue pour tous et tournée vers les plus fragiles et les périphéries. Son encyclique « Laudato si » nous invite à une écologie intégrale . Ainsi il rappelle que est est lié : mon rapport avec moi, avec les autres, avec la terre et avec Dieu.

Témoignage de Raphaël sur l’encyclique Laudato si

Raphaël qui s’est imprégné de l’encyclique Laudato Si en redit quelques éléments essentiels
« Pour cette lettre, le titre Laudato Si’ est tiré du célèbre cantique des créatures de St François d’Assise. C’est une lettre sur l’écologie, sur la sauvegarde de notre maison commune. Une lettre adressée aux catholiques, mais aussi à toute personne de bonne volonté.
Je dirais que le regard et la parole de François sont faits de lucidité et d’espérance.
Lucide car il ose regarder et nous montrer la réalité des situations si terrible soit-elle, et espérant car il le fait pour nous aider à ainsi « reconnaître la contribution que chacun peut apporter ».
Il lance un appel, « une invitation urgente à un nouveau dialogue sur la façon dont nous construisons l’avenir de la planète. »
Il est « convaincu que tout changement a besoin de motivations et d’un chemin éducatif. »
C’est là qu’il aborde la notion de sobriété joyeuse, heureuse. »

Témoignage de Monique et Patrick Savatier sur leur maison autonome

Patrick et Monique Savatier ont évoqué leurs parcours de vie (sur une durée de 20 ans) sur le chemin de la sobriété heureuse. Ils ont fait des travaux d’isolation dans leur maison, transformé leur environnement afin de devenir autonome. Ils ont évoqué les changements mais aussi leurs choix de vie.
Beaucoup de gestes qui leur ont permis d’économiser l’énergie et de vivre en harmonie avec la terre (Panneaux solaires, four solaire, voiture électrique rechargée avec leur propre énergie, leds dans la maison, pas de climatisation, peu de repassage, jardin en permaculture, compost…) Ils réutilisent les objets, fréquentent les ressourceries. Ils économisent l’eau et récupèrent l’eau de pluie.
Ils ont évoqué leurs engagements associatifs et citoyens sur leur lieu de vie. (Association Terre et humanité) Ils participent aussi à la commission de l’écologie intégrale du diocèse. Ils nous ont invité à écouter le chant de J.J Goldman « les choses »
Ils ont conclu avec les mots du pape François : « La nature est pleine de mots d’amour »

Témoignage de Frère François-Marie sur la sobriété dans la vie monastique-

Frère François -Marie de l’Abbaye de Bellefontaine a développé la sobriété des moines vécue selon la règle de St Benoit.
Il a commencé son propos par le mot sobrius qui se traduit « qui n’est pas ivre »
La sobriété joyeuse est un chemin de vie dans la modération et la mesure.
Cela se vit dans la manière de vivre la gouvernance : servir plutôt que régir
Tout est en commun mais chacun a ce dont il a besoin. La parole de l’Abbé est comme un ferment au sein de la communauté.
Ce chemin de vie est lié à un appel qui donne un sens. Il passe par la connaissance de soi et un ajustement à tout ce qui est créé. On est toujours en cheminement …
La place du silence est nécessaire. C’est un espace qui permet de faire son chemin de vie. Il est rempli de respect. Mais il faut faire attention ce n’est pas le silence qui tue et qui méprise mais celui qui fait vivre. Le silence permet l’écoute et donne la parole à l’autre.
On peut mettre en opposition la sobriété et l’activisme permanent.

Témoignage d’ Anthony sur sa rencontre avec Pierre Rabhi et sur propre son chemin de vie

J’ai rencontré Pierre Rabhi dans plusieurs contextes au cours des années 2000, d’abord au sein même de sa ferme et du projet d’habitats partagés de sa fille Sophie, où j’ai été bénévole. Ensuite en tant que stagiaire au sein de son association « Terre et Humanisme », et enfin en tant que pratiquant bouddhiste au centre bouddhiste tibétain Karma Ling en Savoie, ou Pierre était le parrain du volet « écologie » du centre, comme il a pu l’être pour le monastère chrétien de Solan dans le Gard.

Pierre Rabhi prônait la simplicité volontaire, ou la sobriété heureuse, deux termes qui veulent bien dire la même chose : il faut dire qu’il la portait sur lui, la sobriété !!!! Sobre, il l’était de par sa discrétion, petit bonhomme toujours égal, toujours très calme, mais toujours heureux d’offrir un sourire, une parole sympathique, dans la plus grande simplicité. Ce qui ne l’empêchait pas d’avoir un certain caractère, entendons-nous bien... Même matériellement parlant, il portait la sobriété sur lui : je me souviens de ses pulls qui, quoique tout à fait présentables, étaient souvent rapiécés de coudières… Je pense que Pierre parlait parce qu’il le fallait, non parce qu’il aimait parler : il avait depuis longtemps compris l’impasse vers laquelle l’humanité fonçait tête baissée, et avertir ses concitoyens était le devoir qu’il s’était donné… Mais Pierre était plus de mon point de vue quelqu’un qui préférait écouter les autres plutôt que de s’écouter parler.

« Humus, humanité, humilité, même sémantique » : s’il n’y aurait bien qu’une parole à retenir du discours de Pierre, c’est bien celle là. Elle montre bien le lien qu’il faisait entre le terreau « terrestre », et le terreau « humain », et c’est bien somme toute tout ce qu’il a fait de sa vie : vivre simplement de la terre et tacher de faire de son mieux pour aider les autres à y accéder, à la travailler sans la malmener, à en vivre sans la détruire. Il accordait autant d’importance à la Terre qu’à l’humain : je me souviens l’entendre dire : « où est l’intérêt de trier ses déchets, d’être un parfait écolo si on n’est pas capable de s’entendre avec son voisin »… C’était un humaniste, dans le sens où il aimait profondément les gens, de tous milieux, de toute religion…
Sans doute qu’il fut un exemple pour moi, et que la façon dont je vie maintenant est dû en partie à ma rencontre avec lui. En partie, car en parallèle, j’étudiais le bouddhisme, tibétain en l’occurrence, et la deuxième maxime que j’ai retenu est celle du Dalaï Lama : « Il n’y a pas d’écologie extérieure sans écologie intérieure ». Avant d’être sobre dans la vie de tous les jours, il me fallait donc être sobre dans ma tête ??? La sobriété heureuse est d’abord une attitude intérieure.

Qu’est ce que veut dire « être sobre intérieurement » pour moi ? « HEUREUX LES SIMPLES D’ESPRIT » !!!! J’ai toujours trouvé que cette parole du Christ résumait parfaitement cette sobriété intérieure. Chacun bien sûr peut l’interpréter différemment, mais personnellement je l’ai prise comme une injonction à justement « se simplifier l’esprit »…

Je ne peux parler que de mon vécu, qui est celui de la méditation. Méditer c’est avant toute chose « observer l’esprit ». L’observer, c’est déjà s’en détacher, prendre du recul par rapport à cette somme de pensées et d’émotions ininterrompue qui nous entraine parfois dans des scénarios dignes de films hollywoodiens… Et tenter de jeter un œil derrière ces pensées et ces émotions… Y’a t’il quelque chose derrière ? C’est un travail de très longue haleine, répétitif, qui à la longue permet un tant soit peu de se simplifier l’esprit, dompter l’esprit, de le maîtriser, de l’user. En gros : d’en simplifier la gestion.

Cette simplification aura d’abord pour conséquence de « vivre en bonne entente avec ». D’être heureux donc !!

Dans HEUREUX LES SIMPLES D’ESPRIT, il y a HEUREUX !!! Parfaite définition de la sobriété heureuse !!! Rendre l’esprit « sobre » amène le bonheur !!!

Voilà la façon dont, de mon coté, j’ai tenté de m’y prendre pour aller vers cette « simplicité de l’esprit », ou « sobriété heureuse »… Dans le quotidien, je me suis vite rendu compte qu’il était plus facile de vivre matériellement de façon simple, quelque part à la manière d’un moine : d’un coté méditer me faisait me rendre compte que le « toujours plus » est une injonction de l’esprit, mais qu’on n’était pas obligé de le suivre !!!! Et de l’autre, vivre avec peu me permettait également de ne pas trop agiter l’esprit, toujours enclin à vouloir ce « toujours plus »… Faire des marches itinérantes pendant les vacances m’a aidé à ça par exemple : tu pars avec ton sac à dos, ton duvet, ta tente et ta brosse à dent, et c’est tout… Et tu te rends bien compte que tu peux vivre seulement avec ce qui tient dans ton sac… Et que tu vis bien, d’autant mieux que tu n’as rien, et plus d’autres soucis que de manger et dormir...

L’esprit, ou l’ego, la bête à dompter, est bien le moteur de la catastrophe vers laquelle nous allons : si on le laisse faire, il nous incitera à toujours plus consommer… Et donc à toujours plus nous enfoncer dans les conséquences du changement climatique. L’accumulation est le moteur du mal être : plus on possède, plus on a de problème, moins on est heureux. Mais il faut toucher ça avec ses tripes, au fond de soi même pour l’appliquer de manière naturelle dans le quotidien. Pas la peine de se forcer : ça vient quand ça doit venir pour ceux qui souhaitent tendre vers ça… C’est l’expérience que j’ai retenu de la fréquentation de gens qui portaient ça en eux : Pierre Rabhi ou certains sages bouddhistes… Il y a bien d’autres exemples dans le monde chrétien, l’abbé Pierre ou le pape François portent aussi ça en eux, ils sont des modèles qui peuvent aider à toucher la sobriété heureuse… Grand merci à eux, même si on n’est pas à leur niveau, on tend vers, et c’est déjà super.


Ceux qui le voulaient ont participé à la messe dominicale, célébrée, en raison de ce forum, à la chapelle Notre-Dame de bon secours à Bellefontaine. Le diacre a envoyé les fidèles dans la paix du Christ en les invitant à vivre au mieux la sobriété joyeuse.